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Rencontre de janvier 2016


Ce soir, 13 personnes composent le groupe. Nous sommes originaires du Québec, de France, de Syrie et du Mexique.


Un thème peu habituel nous réunit : « Quel Québec voulons-nous avoir construit à l’horizon 2026 ? »


Notre témoin invité : Jacques Gélinas, sociologue chevronné, captivé par les questions de mondialisation. Il vient de publier récemment Le néolibre-échange, où il analyse la dynamique des grands traités internationaux qui maltraitent notre démocratie, accroissent les écarts de richesse. Il appelle à une vision de coopérativisme, qui préfigure une nouvelle économie.


En guise de réchauffement, un texte humoristique …sur l’hiver québécois. C’est l’increvable Boucar Diouf qui nous l’offre : « De la Syrie à la Sibérie ».  Mëme un Sénégalais d’origine sait de quoi il parle, lorsqu’il a goûté aux tempêtes de Rimouski dans le bas du fleuve St-Laurent. Faites-vous le plaisir d’aller savourer ce qu’il en dit…


SoireeCC_2016-01-11_JacquesGelinas_IMG_5588_cw2.jpgLes valeurs qui ont forgé le Québec d’aujourd’hui
Jacques Gélinas nous propose une perspective historique : « Nous sommes tous des immigrés sur la terre du Québec ». Il faut savoir que Samuel de Champlain (fondateur de Québec en 1608) s’était promis qu’il traiterait les Indiens d’ici avec plus d’humanité que les Espagnols en ont eu avec les peuples du Mexique. Le Québec d’aujourd’hui s’est construit autour de certaines valeurs universelles dont les racines remontent aussi loin qu'à cette époque : liberté, égalité devant la loi et dans les rapports hommes-femmes, démocratie, fraternité, laïcité de l’État. Il conclut: nous pouvons dire que « nous étions des immigrés humanistes, et nous le sommes encore. »


Un symbole peut en cacher un autre…
Nos valeurs et nos modèles sociaux se disent par des symboles capables de dire l'attachement qu'on leur porte  -  par exemple le vêtement  -  mais ils peuvent aussi provoquer une réaction émotive chez d'autres. Prenons l’exemple du voile islamique, qui a été au cœur de la recherche d’accommodements raisonnables au Québec ces dernières années. Comme bien des Québécois, Jacques Gélinas y voit un symbole de sujétion des femmes à un modèle patriarcal. Le port du voile lui parait légitime dans le privé, mais il n'a pas sa place quand on dispense un service public. Ceci dit, il reconnaît volontiers que les gens issus de l’immigration nous apportent beaucoup, vivent des valeurs que nous-mêmes ne cultivons pas assez : par exemple la vie familiale, la fraternité, l’éducation des enfants…


Une participante à la soirée, à la fois Syrienne musulmane et intégrée au Québec depuis plus de 40 ans, trouve nécessaire de nuancer ce point de vue : aux yeux d’une femme musulmane, le voile peut symboliser autre chose : son sentiment d’identité culturelle. À preuve, ces jeunes qui se radicalisent dans d’autres pays, se mettent à porter le voile pour marquer leur réaction à ce qu’ils considèrent comme l’impérialisme occidental.


Miser sur la confiance
Cet échange, déroutant sur le moment, nous a permis une heureuse prise de conscience sur les rapports interculturels. Un Amérindien nous dirait: « essayez donc de marcher une lune dans les mocassins de l'autre ». Arriver à ce que chacun, issu de la société d'accueil ou de l'immigration, se sente compris dans sa légitimité et fasse l'effort d'en offrir autant à l'autre.


Chaque société a ses étapes de croissance
L’échange nous a amenés plus loin, questionnant l’évolution de notre société québécoise : « ...on a jeté le bébé avec l’eau du bain ». Notre recherche d’égalité homme-femme est quelquefois devenue une consigne de similitude dans les comportements ou les responsabilités : les hommes de ma génération en sont venus à ne plus savoir quelle était leur différence. « N’a-t-on pas échappé la complémentarité du masculin et du féminin ?... » « ...Et l’hypersexualisation qu’on connaît ici ne serait-elle pas une autre forme d’oppression de la femme ?... » L’échange a aussi mis en évidence que l’évolution sociale ne se vit pas avec les mêmes étapes dans toutes les sociétés : ainsi la Syrie a accordé le droit de vote aux femmes avant le Québec.


SoireCC_2016-01-11_IMG_5591.jpg

Élargir notre vision du Québec au Monde
L’échange devenait de plus en plus captivant. Des gens ont abordé des sujets en apparence éloignés du thème : des problèmes comme le capitalisme déshumanisé qui accentue les écarts de richesse, la guerre et les migrations, la mainmise des grandes entreprises sur nos gouvernements… Les rendez-vous d’urgence de l’écologie, de la paix et de la démocratie à restaurer… Nous étions rendus ailleurs.


Dans mon rôle d'animateur, je me demandais comment recentrer l’échange ! …jusqu’à ce que j’aie un flash. J’ai senti comme une vague de fond dans le groupe : nous étions en train de prendre conscience que des priorités plus vitales, planétaires, nous appellent, et ça presse. Qu'il est temps de nous mettre ensemble pour y répondre, et que nous allons trouver là de quoi dissoudre nos disputes de symboles. C'est St-Exupéry qui écrivait : « Faites-leur construire une tour, vous en ferez des frères »...


Des extraits de ce qui s’est échangé
- « …l'important, c'est de remettre la vie au centre de nos décisions. Les femmes sont les porteuses de vie… »
- « Les changements vont venir du cœur : ce sont ces valeurs (que nous apportent les immigrants)…
- « Qu'est-ce que la Terre nous enseigne?... Apprenons des enfants, qui sont les seuls à garder leur joie au milieu des conflits... Les réfugiés ont peut-être des choses à nous apprendre… »

- « On ne se sent peut-être pas assez responsables du monde de demain. ... Le fait de se parler ce soir me fait du bien. »

- « J'ai aussi la conviction que quelque chose va changer. Je pense que la conscience humaine continue de monter. Comme on a connu la fin de l'esclavage, la décolonisation, la montée de la reconnaissance des femmes... On s'en va vers une vague de non-matérialisme chez les jeunes...»
 

Nous n’avions pas vu le temps filer, déjà c'était déjà le moment du goûter. Quelque chose de très intérieur s'était passé...
Tous trouvaient évident qu’il fallait poursuivre cet échange à la prochaine rencontre...

Notre prochaine soirée-rencontre:  8 février 2016 (2e lundi du mois)
ouverte à tous, y compris les nouveaux participants

Denis Breton,
animateur du projet Cultures au coeur


Date de création : 2016/01/29 - 18:27
Dernière modification : 2016/06/30 - 20:31
Catégorie : Échos de nos activités - 2016
Page lue 6914 fois


Réactions à cet article

Réaction n°3 

par Nour_Sayem le 2016/01/31 - 08:08

« Merci Denis,Quel bon résumé! C'était difficile de faire l'animation,j'avoue! Mais tu l'as fait avec brio. Il y a eu un esprit de respect et d'échange.


Je donne une conférence le 2 février à la bibliothèque Marie-Victorin, à l'Ancienne-Lorette. Peut être il y a du monde qui peuvent y assister. »


Réaction n°2 

par Jacques_Glinas le 2016/01/30 - 20:18

« J'ai fort apprécié cette rencontre du coeur et de l'esprit. Échanges fructueux, discussions intéressantes, rencontres enrichissantes, ambiance chaleureuse. Je crois que les gens apprécient ton initiative dans cet effort de rassemblement si nécessaire aujourd'hui. Nous vivons une époque nouvelle, un changement d'époque. Il faut en être conscient pour bien prendre la vague. »


Réaction n°1 

par Maurice_Dumas le 2016/01/30 - 20:13

 « J’ai grandement apprécié la soirée. Le sujet d’hier ouvre grande la porte sur nos espérances, nos peurs et nos croyances. En parler c’est explorer toute notre humanité. Merci à toi d’oeuvrer pour une plus grande conscience.
Cordialement, »  


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Dernière mise à jour: 7 février 2019