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Réfugiés : des choses à savoir de part et d'autre...
rencontre de mars 2016

SoireeCC_2016-03-14_A_dw.jpgCultures représentées:  Ce soir, dix personnes autour de la table nous livrent des vécus provenant de la République démocratique du Congo (RDC), du Québec, du Maroc, du Mexique et de la Syrie.

Thème de la rencontre: « Les débuts de la vie au Québec, quand on est réfugié ».

Invités:  Pour en témoigner, nous avons le bonheur d'accueillir Jasmine Turcotte-Vaillancourt, travailleuse de milieu à Québec, accompagnée de deux personnes réfugiées originaires de la République démocratique du Congo. Jasmine anime depuis plus d'un an le local communautaire d'un secteur de Vanier, tout près d'où habitent Faustin et Yolande, ses invités.

Yolande habite Québec depuis un an et demi. Faustin, depuis 6 mois; Il a vécu en camp de réfugiés, puis nous est arrivé avec 10 enfants, dont 8 qui sont les siens.


Un premier logement, souvent de passage

Jasmine Turcotte-Vaillancourt constate que ce secteur de Vanier est pour plusieurs un lieu de transit. Pour bien des familles, elles y trouvent un logement immédiatement disponible, sans avoir à se soumettre à une enquête de crédit, et qui les rapproche de leurs compatriotes. Par la suite, plusieurs accèdent à un logement à loyer modique (HLM) ou trouvent un logement qui convient mieux à leurs besoins familiaux. Il semble que beaucoup quittent pour l'Ontario, attirés par l'apprentissage de l'anglais, mais plusieurs d'entre eux déchantent, appréciant par contraste la qualité de l'accueil qu'ils avaient reçu à Québec.


Les Québécois gagnent à savoir sur les réfugiés...

À peine un tour de table pour présenter les participants et leur monde d'expérience interculturelle, que Jasmine Turcotte et ses invités se font demander : « Quelles sont trois choses que les Québécois devraient savoir à propos des réfugiés? »

  • ...Savoir que « Tous nous fuyons la guerre, nous sauvons notre vie... » (Faustin)SoireeCC_2016-03-14_Faustin_cw.jpg
    C'est le plus souvent ce qui justifie une demande de statut de réfugié. « ...Non, nous ne sommes pas dangereux ni agressifs, c'est tout le contraire. »

    Selon le pays d'accueil, plusieurs raisons existent d'accueillir des réfugiés; la compassion n'est pas la seule. Dans le cas des migrants syriens, le gouvernement canadien actuel avait fait un enjeu électoral d'en accueillir 25 000  -  ce qu'il a réalisé. Il en aurait pris en charge financièrement la moitié, appuyé par la ferveur populaire et la forte couverture des médias. Les autres ont dû être soutenus par des familles ou par des organismes. Nos invités questionnent la réalité de conditions inégales d'accueil, en ce moment, selon qu'on est Syrien ou d'une autre origine.

    Il est vrai qu'on trouve une grande variété d'expériences vécues selon les demandeurs d'asile. Les Syriens sont souvent très scolarisés, ont connu avant la guerre des conditions de vie souvent semblables à celles des Québécois. Par ailleurs, une minorité seulement parle le français et l'étiquette de Musulman n'est pas toujours à leur avantage.
    Les gens venant de l'Afrique noire, eux, parlent déjà le français pour la plupart. Mais ils proviennent de contextes de vie souvent très difficiles : pauvreté, problèmes d'accès à l'eau courante, racisme...

    SoireeCC_2016-03-14_Yolande_cw.jpgNos invités attirent notre attention sur les stress vécus au long de leur parcours. « Souvent ici commence une troisième vie, des fois plus... » décrit Faustin. Car plusieurs ont dû migrer ailleurs avant de venir ici, et quelquefois vivre des années dans les camps de réfugiés. « Arrivant ici, nous pensions être arrivés au bout de nos stress. On nous a appris qu'il nous faudra rembourser  -  dans mon cas 10 mille dollars  - pour nos billets d'avion. C'est dur nerveusement, quand on n'a même pas encore de travail. Je n'ai plus aucun papier.. Pourtant, mes enfants vont contribuer au pays...».
    Yolande ajoute : « On nous donne d'un côté, mais on nous reprend de l'autre. »

     
  • ...Savoir que « Nous ne savions pas... »
    L'information donnée aux futurs réfugiés apparaît très sommaire, inégale selon les contingents. Ils n'ont habituellement pas le choix du pays ni de la localité où ils vont se retrouver. Ils croient qu'au Canada on parle anglais partout  -  et c'est souvent cette langue qu'ils convoitent, comme un facteur de réussite.

     
  • ...Savoir que les réfugiés nous ressemblent dans notre parcours historique
    « Rappelez-vous votre société québécoise, il y a 50 ans... »
    Les familles étaient nombreuses, l'importance de se marier était une valeur commune reconnue, les relations hommes-femmes étaient peu égalitaires, la religion avait une forte emprise sur la population, etc. « C'est la même histoire » résume Jasmine Turcotte, pour donner une idée des sociétés d'où sont issus nos demandeurs d'asile.

     

Les réfugiés gagnent à savoir sur les Québécois...

Jasmine s'était préparée à répondre aussi à cette question, et les participants ont volontiers ajouté leurs points de vue :

  • ... Que les Québécois visent à établir des relations hommes-femmes égalitaires.
    Ils souhaitent que les nouveaux arrivants respectent cette valeur.
     
  • ... Que les Québécois ont largement délaissé la pratique religieuse, c'est vrai.
    Mais leur attachement à leur héritage historique et aux valeurs du christianisme reste bien vivant.
     
  • ... Que les Québécois ont des raisons moins connues pour faire comprendre leurs choix
    « Je ne penserais jamais envoyer mes parents en maison de vieillesse », dit un participant néo-québécois. Il ajoute qu'il en a mieux compris les raisons avec le temps  -  par exemple un désir de sécurité pour les parents en perte d'autonomie, alors qu'il n'y pas à la maison d'adulte pour en prendre soin; ou pas de petits-enfants à chouchouter. Et ce choix vient souvent des aînés eux-mêmes, qui eux aussi ont été habitués à préserver leur intimité et leur indépendance.


«Prenez confiance... »

Les participants écoutent attentivement nos invités, puis se font réconfortants. « Ça va se résoudre... D'ici trois ans vous aurez payé votre dette... » « Vous parlez déjà le français, je connais des Syriens dont les enfants doivent attendre pour entrer en francisation en septembre prochain » (dans 6 mois). « Ici aussi nos ancêtres ont connu une vie très difficile. Je vous encourage à persévérer.. » « Une Québécoise d'adoption est frustrée de se faire refuser un permis d'enseigner alors qu'elle enseignait déjà dans son pays. Puis elle a réalisé que les Québécois d'origine sont astreints aux mêmes exigences... »

Les participants échangent aussi leurs connaissances sur les services existants (ex.: le S.O.I.T., le service des plaintes qu'ont les organismes gouvernementaux), ou sur des outils utiles à l'intégration (ex.: le livre de Dany Laferrière, ''Tout ce qu'on ne te dira pas, Mongo)''.


« Qu'est-ce que ça te fait de côtoyer des réfugiés ?... »

Jasmine Turcotte nous répond:SoireeCC_2016-03-14_JasmineDenis_cw.jpg
- « On nous confie des histoires inimaginables. Ça m'apprend à relativiser tout. Que nos trottoirs soient mal déneigés, ce n'est peut-être pas si grave... »

- « Les réfugiés me font réaliser la place du réseau social que nous on a perdu. Je vois des gens ici depuis trois mois seulement, et qui ont de la visite, de la visite ! Moi je suis chez moi et je me retrouve seule... Vous me donnez envie de relation.

- « Je constate la force de la religion pour eux... Ils me paraissent tellement entourés ! »


Des participants. appuient :

- « Ici tu passes beaucoup de temps seul. Les Africains téléphonent, ils ne textent pas. Être seul: un des plus gros chocs que j'aie vécus au Canada... ».
- Faustin confirme ce sens du contact direct : « En Afrique manger ensemble est primordial, car alors toute la famille est présente. Le Noir nous dit bonjour. Je viens sans rendez-vous... »
- Un autre ajoute : « Je voyais passer des Chinois: je les trouvais vivants... »

Par ailleurs, ceux qui sont au Québec depuis plus longtemps se rendent compte qu' 'ils ont pris goût au désir d'indépendance des Québécois.
- L'un apprécie qu'on ne débarque pas chez lui à toute heure, quand il est en pleine tâche.
- Une participante syrienne, avec une pointe d'humour : « Après 50 ans au Québec, je commence à trouver que les Syriens sont collants !... »


Une soirée intense, oui. Les participants repartent avec le sentiment de s'être un peu plus compris de part et d'autre.

Denis Breton,
animateur de la rencontre
 


Date de création : 2016/03/30 - 13:32
Dernière modification : 2016/06/30 - 20:28
Catégorie : - 2016
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Dernière mise à jour: 7 février 2019